Ce forum est devenu, à ce stade, incompatible avec mon rétablissement, et cela est d'autant plus vrai que je cherche de plus en plus à m'éloigner de mon ordinateur. On disait, à juste titre, que pondre un forum Internet pour cyber-sex-addicts c'était comme organiser des réunions des AA dans un bistrot. Le web et l'usage immodéré que j'en fais deviennent pesants à force, et je goutte avec impatience le jour où je saurai me passer totalement de cette calamité. Pour lors, enlevez le forum, et je n'ai plus peur de me retrouver sans internet à portée de main, puisque celui-ci n'est plus sensé me « sauver » ( de quoi au juste, serait-il sensé pouvoir me sauver ? Des dangers de la pornographie sur Internet ? Mais si internet en tant que source de contenus est LE danger majeur, n'est-ce-pas contreproductif ? ). En matière de garde-fou, j'opterai maintenant d'avantage pour les bouquins, et ma libre réflexion ( doublés comme toujours de l'aide d'un psy ).
J'ai dit que ce forum m'était devenu inutile, j'ai même affirmé qu'il devenait dangereux pour moi, mais mon petit procès à son encontre serait incomplet si je n'en venais pas à généraliser mon cas. Je pense en effet que ce forum n'est pas, au-delà d'un certain temps, un outil qui soit au service du dépendant. Il n'est ni une solution, ni une nécessité, bien qu'il puisse s'avérer utile. Ce qui est nécessaire, c'est de savoir reconnaître le mal là où il se terre, et le site d'Orroz fournit de nombreux éléments de réflexion, détecteurs et indications aidant à ce qu'une remise en question profonde de nos comportements ait lieu. Une fois le tabou levé, il faut comprendre ce qui nous a amenés là, et refondre entièrement notre rapport à nous-même et au monde, ce qui est plutôt un travail d'ordre psychothérapeutique, à mener, donc, avec un(e) psy compétent(e). Ce forum ( mais les autres forums d'entraide ne sont pas exempts de ces remarques ), comme tout forum, nous projette dans un univers virtuel où le clic règne en maître, où la lecture est souvent rapide ( et donc superficielle ), où la facilité d'accès, la perte du sens du temps, et la création d'un personnage « avatar » idéal différent de nous-même ne fait que nous éloigner d'un hypothétique retour à la réalité. A trop nous faire miroiter une cyber-aventure de pacotille, nous en oublions de mettre la main à la pâte.
L'entraide, mot laissant à rêver d'une communauté soudée, foncièrement bienveillante et altruiste, n'y est jamais en fait que la réflexion pathétique de l'ego de chacun sur la suffisance des autres, et si l'humilité nous manque, c'est peut-être aussi faute de ne pas se parler d'homme à homme. Nous rêverions d'une entraide parfaite, mais (l'avons-nous oublié ?) nous sommes malades, gravement malades de l'affect.
Je quitte aussi ce forum pour des raisons aussi diverses que variées : raisons écologiques, économiques, sociales … J'en ai marre de payer le coût d'une connexion à l'Internet nucléaire, qui n'est qu'une camisole moderne de plus pour les larves qui s'y accrochent. Je n'ai plus internet à domicile depuis bientôt un mois, et ce n'est pas pour me déplaire. Avoir rencontré des gens bien réels, avec qui j'ai pu discuter de visu de sujets plus profonds que le beau temps, n'est sans doute pas pour rien dans la force de ma résolution. Je participe en effet depuis trois semaines à des assemblées populaires, et gagne en humanité ce que j'y perds en crainte et en prétention. Pour ceux que ça intéresse, le mouvement espagnol des Indignados, puisque c'est de cela qu'il s'agit, a sa version française, et a au moins le mérite d'être une école du respect de l'Autre ; ce sont des choses qui s'apprennent, et prennent du temps à s'apprendre. Depuis lors, j'ai tendance à voir le web et ses microcosmes malsains comme autant de bourbiers insignifiants, de pièges à gogos, de mauvaises blagues … Une fois que l'on murit, les vicissitudes du réel nous font vite oublier le néant abyssal du virtuel. L'un a plus de saveur que l'autre.