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Y a-t-il lieu de parler d'addiction ?
C'est bien la première question qu'il me faut re-poser, et c'est aussi, en passant, la première question que je me suis posé en atterrissant ( comme par miracle devrais-je dire ) sur le site d'Orroz. Tout d'abord, précisons que, quand je parle d' « addiction », je parle ici d'addiction à la pornographie en général ( bien que pour moi ce se soit limité à la cyber-pornographie ), et, du moins dans ce paragraphe, pas d'autre chose que de cela ( je ne parle pas, par exemple, de dépendance affective ).
Pour ce qui est de la dépendance à la pornographie, il est, on l'a vu, encore difficile de nos jours de trouver un soutien théorique satisfaisant du côté de la sphère psy, mais je pense que, de même que l'hystérie existait bien avant les travaux de Charcot, on finira ( du moins je l'espère ) par prendre en considération et en charge cette saloperie. Actuellement, la ( seule ? ) ressource qui me paraisse à peu près convenable est de s'inspirer des travaux déjà effectués sur les autres types d'addiction ; ma psy me sort comme ça qu' il y a des différences majeures entres addiction à une substance et addiction à un comportement, personnellement je doute qu'il y en ait tant que ça, du moins du point de vue neurobiologique, m'enfin ne m'y connaissant plus, il vaudrait mieux se contenter des aspects plus apparents de la chose.
Premièrement, qui dit addiction dit impossibilité à se passer de quelque chose, ou du moins impossibilité à s'en passer sans devoir supporter moult souffrances, n'est-ce-pas ? Eh bien je crois que sur ce point, c'est assez clair ; à voir les difficultés que nous éprouvons à ne pas rechuter, et tous les maux que nous connaissons lorsque nous tentons de nous sevrer, cette condition semble remplie.
Deuxièmement, il y a l'Oubli, l'abandon, et avec cela la honte et le mensonge à soi-même pour y parer. Ce caractère implique une plus ou moins grande conscience du problème, mais qui n'est pas suffisante néanmoins pour véritablement tenter de s'en sortir. A mon sens c'est une caractéristique de cette « dérive » comportementale biens installée dans la plupart des addictions, l'alcoolique ne boit-il pas ( entre autres ) pour oublier qu'il boit ? Je pense qu'au sujet de la honte, du sentiment de s'être souillé via le geste masturbatoire ( attention je n'attente pas un procès à la masturbation ), la plupart des dépendants savent ce que c'est, et que les co-dépendantes nous apportent déjà ( merci à elles ) beaucoup de riches témoignages concernant le mensonge, à soi, et aux autres, évidemment.
Troisièmement ; le « moment » caractéristique de la consommation, la notion de rituel, la régularité de la pratique et cette excitation typique qui précède l'acte en lui-même. Avec à la clé de cette sur-excitation visuelle et « émotive », la fameuse « cyber-gueule de bois » du lendemain. L'addiction à la cyber-pornographie ( entre autres ) fonctionne, à mon sens, et à l'instar d'autres addictions, par « phases » de défonce ; il y a les jours « avec », les jours « sans », et les jours … pour le rituel. L'instant soigneusement préparé, et d'ailleurs, associée à cette construction, l'organisation de l'emploi du temps, l'obsession de l'objet d'addiction = au final on ne vit plus que dans l'attente, dans l'objectif de la « prochaine fois », et ce dès le moment où l'on saisit le sopalin. Le petit tour au bistrot, la bouffée pendant la pause, le rendez-vous habituel pour une enième injection, ou avec son pc après le boulot, sont finalement comparables... [ On pourrait d'ailleurs distinguer plusieurs concepts dans ce « troisièmement », mais je n'en ai ni le temps ni la force ]
Quatrièmement ; l'escalade, elle-même liée à l'accoutumance. De la même façon que l'on passe d'une clope par jour à deux paquets, d'un demi de temps en temps à une bouteille de vodka chaque soir, du premier shoot à l'amputation d'un bras, on sait très bien que l'on commence ( par exemple ) par l'érotisme, puis que ça passe au hard, pour atterrir sur le SM, voire la pornographie infantile, sans parler de l'augmentation de la fréquence de la consommation. Je ne sais pas bien si cette notion d' « escalade » entrerait bien dans les critères déterminant la nature de « dépendance », d' « addiction » d'un comportement donné, après tout, l'accoutumance peut se faire avec beaucoup de substances ou de comportements sans qu'on parle de pathologie n'est-ce-pas ? Mais l'abandon total à l'excès ( qui à mon sens vient tôt ou tard ) et l'obsession du « toujours plus » réunis recoupent des notions déjà abordées, et ce n'est pas parce qu'on aime le chocolat qu'on en mangerait forcément des tonnes au nom de je ne sais quel besoin irrépressible. Il est évident que la prise en compte de tels critères ne doit se faire que dans une perspective plus globale ; c'est l'accumulation de certains caractères qui pour moi permet de dire si un phénomène d'addiction est, ou non, à l'oeuvre.
Pour le moment je n'ai pas d'autres critères bien différenciables à proposer, et c'est peut-être cause d'un aveuglement provisoire lié à la fatigue. Ceci paraît bien succinct compte tenu de l'immensité des témoignages que nous possédons sur ce forum, aussi suis-je ouvert à toute critique constructive. Ce que je retiens surtout de cela, c'est la perspective auto-destructrice de la chose : bien que le dépendant ( au sens large ) sache qu'il est, dans bien des cas, extrêmement mauvais pour lui de continuer, il persévère à se dire le contraire et à s'enfoncer dans son addiction, et c'est un mécanisme qui se retrouve bien sûr chez les SA. Sans parler de masochisme, on pourrait se demander quelles constructions et/ou carences le poussent à ce qui semble être un suicide à petit feu.