Dépendance sexuelle

Version complète : Le Sevrage de Morbach
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Une petite réflexion en passant ; ce matin je me suis rendu compte en consultant le "carnet d'humeur" gentiment recommandé par mon psy(chiatre) que les toutes dernières périodes de stabilité "thymique" ( je ne parle pas du thymus, ceci est un faux néologisme ) correspondent pile-poil aux périodes où j'ai été le plus actif point de vue boulot ( mais aussi point de vue composition ). La question serait de savoir qui de l'un détermine le plus l'autre ; la bonne ( "belle" pour reprendre l'expression du maître ) humeur, ou l'activité spontanée ? C'est précisément dans ce genre de cas qu'il vaut mieux sortir du cadre "causal" ( une cause => une conséquence ), et considérer un schéma à deux sens, voire plus circulaire. L'un favorise l'autre et vice et versa. D'où une certaine spirale ascendante qu'il va me falloir apprendre à maîtriser. 

Je ne fais encore que commencer à comprendre ce que c'est que se lever de bonne heure, le coeur plein d'entrain, en se lançant sans broncher dans l'édification d'un quotidien plus savoureux ; être une fontaine plutôt qu'un puits, ça fait toute la différence...

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Décidément cette semaine n'est pas des plus faciles ; depuis quelques jours, ou plutôt quelques nuits, les rêves érotiques à répétition sont de retour. Bien que je n'aie pas eu de grandes défaites à essuyer ( lire entre les lignes svp ), cela fait deux fois d'affilée que je me réveille en sursaut en plein milieu d'une scène, pour ne pas me rendormir.

Autant avoir le réflexe de couper le délire avant « la fin » est bien pratique, autant quand ça vous octroie 5h de sommeil par nuit c'est plutôt moyen, d'autant plus qu'à peine les yeux ouverts il faut lutter à mort contre une envie pressante de MB ; bref c'est pas la joie. La consultation avec ma psy(chologue) d'hier en rajoute une couche d'ailleurs, ce qui me donne le droit ( à mon sens ) de pondre un gros pâté.

[ A ceux qui passent éventuellement sur ce topic, vu l'approche du sixième mois et les difficultés actuelles, si je vous parais sur une pente glissante, surtout n'hésitez pas à le dire clairement ]

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La discussion d'hier avec ma psy remet pas mal de choses en cause : d'une part elle m'a renvoyé dans les fondamentaux en me rappelant que le but n'étais pas de me limiter au sevrage tout court, et qu'il fallait aller plus loin pour m'en sortir ( c'est louable non ? ). D'autre part, et c'est ce qui m'a posé et me pose encore problème, elle m'a renvoyé sur la certitude que j'avais d'être dépendant, et sur le fait qu'il n'était ( selon elle ) pas forcément nécessaire d'être abstinent pour pouvoir bosser sur les problèmes sous-jacent ( c'est-à-dire les problèmes ayant favorisé le « recours » à l'addiction ) ; qu'il y avait des gens qui s'en sortaient sans passer par la case sevrage.

Personnellement, étant donné le regard éminemment subjectif que par mon statut de patient je pose sur les intentions de ma psy, la validité de son jugement, et l'intérêt des consultations, je me doute bien que je puisse être à côté de la plaque … Mais néanmoins je suis comme la fosse : sceptique ( l' « humour » comme ultime moyen d'auto-dépréciation ). Après tout, rien qu'à voir le peu d'intérêt que l'on accorde actuellement au problème de la porno-dépendance, et le peu de thérapeutes formés spécifiquement à la prise en charge des addictions en général, je ne serais pas surpris d'un certain manque d'expérience de sa part dans le domaine ; mais cessons là la calomnie et passons au véritable problème : à savoir la remise en cause d'un système, d'un mode de fonctionnement, que j'ai, avec des difficultés conséquentes, bâti au cours des derniers mois.

Je suis attaqué ( et avant tout par moi -même ) dans les fondements d'une entreprise qu'il m'apparait pourtant nécessaire de préserver : aussi ai-je besoin de refaire un tour sur la question ; il est nécessaire que je fasse un peu de lumière sur tout cela. Néanmoins, pour bien faire le point avec moi-même, il me faut d'abord me permettre l'ouverture et la mise en place d'un dialogue intérieur, et donc garantir une certaine indépendance ; d'où le fait que j'éviterai de trop me référer à d'autres sources, mêmes tangibles, de plus au risque de redites par rapport à d'autres posts/topics de ce forum. Le cas échéant, désolé.

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Y a-t-il lieu de parler d'addiction ?

 

C'est bien la première question qu'il me faut re-poser, et c'est aussi, en passant, la première question que je me suis posé en atterrissant ( comme par miracle devrais-je dire ) sur le site d'Orroz. Tout d'abord, précisons que, quand je parle d' « addiction », je parle ici d'addiction à la pornographie en général ( bien que pour moi ce se soit limité à la cyber-pornographie ), et, du moins dans ce paragraphe, pas d'autre chose que de cela ( je ne parle pas, par exemple, de dépendance affective ).

Pour ce qui est de la dépendance à la pornographie, il est, on l'a vu, encore difficile de nos jours de trouver un soutien théorique satisfaisant du côté de la sphère psy, mais je pense que, de même que l'hystérie existait bien avant les travaux de Charcot, on finira ( du moins je l'espère ) par prendre en considération et en charge cette saloperie. Actuellement, la ( seule ? ) ressource qui me paraisse à peu près convenable est de s'inspirer des travaux déjà effectués sur les autres types d'addiction ; ma psy me sort comme ça qu' il y a des différences majeures entres addiction à une substance et addiction à un comportement, personnellement je doute qu'il y en ait tant que ça, du moins du point de vue neurobiologique, m'enfin ne m'y connaissant plus, il vaudrait mieux se contenter des aspects plus apparents de la chose.

Premièrement, qui dit addiction dit impossibilité à se passer de quelque chose, ou du moins impossibilité à s'en passer sans devoir supporter moult souffrances, n'est-ce-pas ? Eh bien je crois que sur ce point, c'est assez clair ; à voir les difficultés que nous éprouvons à ne pas rechuter, et tous les maux que nous connaissons lorsque nous tentons de nous sevrer, cette condition semble remplie.

Deuxièmement, il y a l'Oubli, l'abandon, et avec cela la honte et le mensonge à soi-même pour y parer. Ce caractère implique une plus ou moins grande conscience du problème, mais qui n'est pas suffisante néanmoins pour véritablement tenter de s'en sortir. A mon sens c'est une caractéristique de cette « dérive » comportementale biens installée dans la plupart des addictions, l'alcoolique ne boit-il pas ( entre autres ) pour oublier qu'il boit ? Je pense qu'au sujet de la honte, du sentiment de s'être souillé via le geste masturbatoire ( attention je n'attente pas un procès à la masturbation ), la plupart des dépendants savent ce que c'est, et que les co-dépendantes nous apportent déjà ( merci à elles ) beaucoup de riches témoignages concernant le mensonge, à soi, et aux autres, évidemment.

Troisièmement ; le « moment » caractéristique de la consommation, la notion de rituel, la régularité de la pratique et cette excitation typique qui précède l'acte en lui-même. Avec à la clé de cette sur-excitation visuelle et « émotive », la fameuse « cyber-gueule de bois » du lendemain. L'addiction à la cyber-pornographie ( entre autres ) fonctionne, à mon sens, et à l'instar d'autres addictions, par « phases » de défonce ; il y a les jours « avec », les jours « sans », et les jours … pour le rituel. L'instant soigneusement préparé, et d'ailleurs, associée à cette construction, l'organisation de l'emploi du temps, l'obsession de l'objet d'addiction = au final on ne vit plus que dans l'attente, dans l'objectif de la « prochaine fois », et ce dès le moment où l'on saisit le sopalin. Le petit tour au bistrot, la bouffée pendant la pause, le rendez-vous habituel pour une enième injection, ou avec son pc après le boulot, sont finalement comparables... [ On pourrait d'ailleurs distinguer plusieurs concepts dans ce « troisièmement », mais je n'en ai ni le temps ni la force ]

Quatrièmement ; l'escalade, elle-même liée à l'accoutumance. De la même façon que l'on passe d'une clope par jour à deux paquets, d'un demi de temps en temps à une bouteille de vodka chaque soir, du premier shoot à l'amputation d'un bras, on sait très bien que l'on commence ( par exemple ) par l'érotisme, puis que ça passe au hard, pour atterrir sur le SM, voire la pornographie infantile, sans parler de l'augmentation de la fréquence de la consommation. Je ne sais pas bien si cette notion d' « escalade » entrerait bien dans les critères déterminant la nature de « dépendance », d' « addiction » d'un comportement donné, après tout, l'accoutumance peut se faire avec beaucoup de substances ou de comportements sans qu'on parle de pathologie n'est-ce-pas ? Mais l'abandon total à l'excès ( qui à mon sens vient tôt ou tard ) et l'obsession du « toujours plus » réunis recoupent des notions déjà abordées, et ce n'est pas parce qu'on aime le chocolat qu'on en mangerait forcément des tonnes au nom de je ne sais quel besoin irrépressible. Il est évident que la prise en compte de tels critères ne doit se faire que dans une perspective plus globale ; c'est l'accumulation de certains caractères qui pour moi permet de dire si un phénomène d'addiction est, ou non, à l'oeuvre.

Pour le moment je n'ai pas d'autres critères bien différenciables à proposer, et c'est peut-être cause d'un aveuglement provisoire lié à la fatigue. Ceci paraît bien succinct compte tenu de l'immensité des témoignages que nous possédons sur ce forum, aussi suis-je ouvert à toute critique constructive. Ce que je retiens surtout de cela, c'est la perspective auto-destructrice de la chose : bien que le dépendant ( au sens large ) sache qu'il est, dans bien des cas, extrêmement mauvais pour lui de continuer, il persévère à se dire le contraire et à s'enfoncer dans son addiction, et c'est un mécanisme qui se retrouve bien sûr chez les SA. Sans parler de masochisme, on pourrait se demander quelles constructions et/ou carences le poussent à ce qui semble être un suicide à petit feu.

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Suis-je dépendant ?

Quand on ( ma psy ) me demande si je me considère comme dépendant, bien au-delà de l'intérêt que cela pourrait avoir dans le cadre d'un travail psychothérapeutique ( intérêt que j'ai du mal à cerner ), je ne peux m'empêcher ( tentation de la Bête oblige ? ) de prendre au sérieux la question, une nouvelle fois encore. Pour faire simple, si je m'en tiens aux critères que j'ai posé précédemment, je ne peux en fin de compte que répondre par l'affirmative ; le problème devient ainsi une question, à laquelle il est relativement aisé de répondre.

1 ) Pour ce qui est de l'attachement, je sais que dès les premiers mois de « consultation » de sites pornos je me suis retrouvé comme coincé dans un étau : en mai 2007 j'avais déjà besoin des MB ( alors que j'étais hospitalisé en service psychiatrique, je n'ai pas pu me retenir deux semaines durant ), et je me souviens d'un voyage en Irlande, en avril 2008, qui m'avait paru une bénédiction, car durant dix jours, la promiscuité m'avait aidé à souffler un peu, qui plus est loin de mon ordi : la situation n'avait guère changé à l'été 2009 quand, après l'acquisition de mon PC portable, je passais à regret des heures à mater à l'abri des regards => ceci sans compter les innombrables tentatives plus ou moins sérieuses de m'en sortir, que j'ai fait avorter, et les 4 mois d'errance qui suivirent la « découverte » d'Orroz fin juillet 2009, avant le début du seul sevrage qui ait jamais tenu le coup : celui là que je poursuis actuellement. Il m'a fallu, et ça ne s'est pas fait sans mal, accepter que je n'avais aucun contrôle sur la chose ; c'était partir en vrille ou tout supprimer. Je pense que le simple fait d'avoir dû choisir entre deux options dont les issues étaient radicales en dit suffisamment long sur mon incapacité de l'époque : 1) à me passer de la pornographie 2) par conséquent à garder une certaine mesure dans sa consommation.

2 ) La honte, je l'ai eue dès le début en fin de compte : honte par rapport au côté avilissant, inhumain de la chose, honte de devoir le cacher, honte de ne rien pouvoir maîtriser de ce côté là … Pour l'oubli, c'était, à l'origine, à demi-volontaire : je souhaitais de tout coeur annihiler ma pensée, cesser de ruminer sur la folie de mon père, mon malaise, mon vide intérieur, et tout le reste. Cesser aussi de faire des cauchemars chaque nuit ; j'avais remarqué que la MB excessive ( alliée au manque de sommeil ) m'ôtait toute capacité à me souvenir de mes rêves, fussent-ils agréables ou non. A posteriori, avec la distance, je m'aperçois que ce n'était qu'une excuse qui m' allait bien, qu'un dommage collatéral, que c'était loin d'être la raison fondamentale de cette dérive soit-disant volontaire. Et c'est là que j'en vins au mensonge ; après la minimisation du problème, le « négationnisme » même incertain, vint la nécessité de mépriser plus profondément encore l'humain pour pouvoir trouver le spectacle encore bandant. Puis les premières erreurs de parcours, le premier historique oublié, et le mensonge à autrui ( ma mère en l'occurence ) ; l'important est qu'elle ( qu' « on » ) ne pose pas de question là-dessus, la petite soeur qui en pose des bizarres, de questions ; et les réponses vaseuses, les seules qu'on puisse se permettre de donner.

3 ) Le rituel s'est installé très tôt, mais il faut dire que j'ai le sens du rituel. Toute cette petite cérémonie, obligatoire et faussement plaisante : c'est d'abord le besoin de s'autoriser au préalable un nouvel écart de conduite, puis, le plus souvent, le soir venant, on traîne « sans faire exprès » sur son ordi, puis nonchalamment on fait le tour de la maison, on s'assure que l'on passera inaperçu ( « au cas où » ) ; une fois le tour fait il n'y a plus de re-tour possible. C'est simple, expéditif. On ouvre les sites habituels, on visite les pages déjà prévues à l'avance, un dernier coup d'oeil vers le reste du monde pour s'assurer que le forfait restera inconnu et on prépare le sopalin.

J'organisais mon emploi du temps en fonction du rituel à partir de févirer-mars 2009 environ, et c'est aussi cette nouvelle marche franchie qui m'a poussé à combattre pour de bon le « Système ». Les manifestations physiologiques aussi je le connais, l'euphorie immédiatement suivie d'un relâchement global, la fatigue plombante des heures, des jours qui suivent – et la dépression qui n'aide en rien là-dedans. Manifestations qui suivent aussi le parcours d'une spirale descendante, tant l'euphorie nécessite de plus en plus l'adjonction de doses toujours plus importantes pour se faire ressentir.

Personnellement enfin, je vois nettement une certaine évolution de contenu de début 2007 à mi-fin 2009 ; des images érotiques du WAP, j'en suis arrivé, par les vidéos, à toujours plus de hard ; bien que les Gang Bang aient toujours constitué pour moi une limite infranchissable, je me dis ( lucide ? ) que cette limite n'aurait au final par résisté à l'épreuve du temps.

Je crois que la question en fin de compte n'est pas tellement de savoir si je suis ( nous sommes ) « dépendant(s) » ou de savoir quel qualificatif convient le mieux pour parler de notre mode de fonctionnement vis-à-vis de la pornographie ou d'autre chose ; c'est avant tout de voir, et de continuer à voir qu'il y a un problème, un gros problème à résoudre. On pourrait en effet considérer avec cynisme qu'être dépendant au porno n'est pas un problème, puisque nous sommes « dépendants » à ce que nous mangeons, buvons, respirons, etc … sans pour autant en faire toute une histoire. Seulement se sentir contraint de se tripoter devant des pétasses à poil n'a rien à voir avec un besoin « naturel », avec ce que l'on définirait comme une saine sexualité. Les notions cliniques sont à mon sens essentielles pour traiter correctement cette affection, mais, dans la tête du dépendant, la première étape, avant même de chercher à se soigner, est de prendre conscience de la nature problématique de sa conduite ; pour les autres et avant tout pour lui-même.

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Pourquoi le sevrage ?

Festival des redites, me voici ! La question semble bien inopportune en effet, compte tenu de ce qui précède, et pourtant … Et pourtant l'on ma déclaré qu'il était tout à fait possible de travailler sur le fond de l'addiction ( ce qui nous pousse vers elle ) sans s'occuper de son mécanisme dévastateur, du moins dans un premier temps. Je pense que ce que ma psy a voulu dire, c'est que le boiteux aura bien du mal à se passer de sa canne, de même que le dépendant aura du mal à sa maintenir à flots sans sa came, « tant qu'elle lui sera nécessaire » ( il s'agit peut-être d'une mauvaise interprétation de son discours mais soit, poursuivons ).

-  Je voudrais d'ores et déjà rappeler ce que m'a exposé il y a peu John Warsen ( ou du moins ce que j'en ai compris ) ; à savoir que l'addiction fonctionne selon une logique du noeud coulant ; pour le dire autrement, que suivant cette logique on « soigne » le mal par ce qui le provoque ( ou du moins l'entretient ). D'où l'impossibilité de s'en sortir ainsi, et l'idée que la consommation de pornographie est, pour le dépendant au cybercul, loin d'être un soutien, mais plutôt un boulet qui s'en va grossissant au bout de sa chaîne. C'est paradoxal, mais ce boulet, on a parfois du mal à s'en passer ; à mon sens il faudrait éviter de confondre ce qui semble être une forme de tranquillité provisoire post-éjaculatoire avec une véritable sérénité, et voir plutôt les choses en face, en considérant que le seul soutien authentique dont nous disposons, c'est celui que nous recevons ( trop rarement ) de nous mêmes.

-  Ce qui m'a poussé à combattre le monstre avec mes faibles moyens, c'est tout d'abord la constatation des dégâts que je le laissais provoquer au quotidien. Comment peut on espérer suivre des études supérieures, composer/interpréter/produire sa propre musique, apprivoiser de nouveaux instruments, jongler entre sa vie familiale et un semble d'intégration sociale, si l'on passe 80% ( sinon plus ) de son temps libre à s'exciter sur des corps pixelisés ? Au simple impératif temporel je rajouterai volontiers l'incommensurable fatigue qui me saisissait les jours de défonce et au final presque tout le temps, la peur d'être découvert à tout moment, l'aliénation plus que conséquente et la misère intellectuelle, émotionnelle, physiologique, qui sont particulièrement présentes dans cette addiction. Sans compter que je doive aussi m'occuper de ma dépression et de mes troubles de l'humeur, qui en rajoutent une bonne couche côté anéantissement de soi … Selon notre capacité à nier l'évidence et/ou à supporter de souffrir excessivement pour par grand chose, on tolère plus ou moins longtemps l'intolérable, c'est-à-dire tant que l'escalade, l'avalanche d'excès en tout genres ne nous a pas fait atteindre un certain seuil. Pour ma part je l'ai allègrement franchi il y a une dizaine de mois, période durant laquelle a mûri en moi l'idée selon laquelle, désormais, la maladie devait régresser, absolument.

-  Après cela, il me faut noter une chose qui me paraît étrange dans le raisonnement évoqué plus haut : comment, en effet, peut-on espérer travailler sur les sources du mal, tant que celui-ci nous rend aveugle ? Si je retrouve désormais les racines de bon nombre de comportements qui me sont propres dès la fin de mes années de primaire ( 8-9 ans ), ensemble de schémas qui n'ont cessé de se développer et de mûrir pour me faire tendre vers le culte de l' Autre, puis sa dépréciation et l'abandon dans la sorte de relation idéalisée que constitue la consommation de pornographie ; il faut néanmoins préciser que de telles conceptions ne me sont venues à l'esprit que bien après le début de ce sevrage. Il est d'autant plus important de noter que : d'une part, en raison de la fatigue et de l'épuisement intellectuel provoqués par la surconsommation, d'autre part compte tenu du fait que, dans un sens, l'addiction est là pour pallier à des faiblesses de construction, et constitue en quelque sorte un mécanisme de défense aidant à mettre de côté le bagage émotionnel responsable de notre mal-être, il est difficile de croire que nous pouvons y voir clair en gardant les yeux clos. Si certains y parviennent, quoique j'en doute, et qu'une fois certaines avancées faites, la dépendance, n'ayant plus de raison d'être, s'efface d'elle-même, tant mieux pour eux, mais ce n'est pas mon cas.

-  Enfin, ce qui pousse à commencer et permet aussi de maintenir un sevrage en place, c'est également la question de valeurs. Alors que je ne voyais que peu d'intérêt dans le fait de spéculer sur la question d'un éventuel bien fondé ou mal fondé de la pornographie, et des conséquences de l'existence et du développement « florissant » d'une telle « industrie », progressivement ( et peut-être pas nécessité ? ), s'est institué en moi, au cours du sevrage, un dégoût de plus en plus marqué vis-à-vis de l' « objet pornographique » au sens large. Le fait de trouver avilissante la consommation d'excitants visuels pixelisés n'était pas nouveau chez moi, et je m'en suis toujours plus ou moins voulu d'avoir mis la main là-dedans si je puis dire ( bien que ça n'ait pas été suffisant pour m'en empêcher semble-t-il ). Seulement, au fur et à mesure que la consommation s'intensifiait, ce qui n'était au départ qu'un bien mince pêché contre le bon goût et une insulte à l'intellect ( « un coup de pied dans les couilles à l'intelligence » disait JW ), devint, entre autres par le biais des lectures, quelque chose de proprement méprisable, d'autant plus qu'avec l'augmentation de la fréquence de consommation vint l'évolution du contenu et les processus de déshumanisation nécessaires pour supporter le visionnement. Constater que je n'étais plus qu'une loque à la recherche de sa perf' à plaisir virtuelle m'a poussé à me haïr pour m'être laissé sombrer de la sorte, mais aussi à faire le premier pas ( ce qui est paradoxal quand on sait que le mépris de soi entretient la chose ). Et il n'y a pas que ça ; il y a aussi l'Autre. Je ne parle pas tant du jugement de mes proches sur la pornographie qui sont malheureusement trop tolérants à mes yeux, mais plutôt de la Personne ( eh oui ! ) sur laquelle on sacrifie tant d'instants. Si la pornographie déshumanise, aliène le consommateur, que dire de ce qu'elle fait aux « actrices » et « acteurs » qui participent à son élaboration ? Que dire de la scatophilie ? De la zoophilie ? De la pédophilie ? Parce qu'il faut être réaliste ; quel que soit notre « niveau » de consommation, nous favorisons ce genre de procédés dès que nous cliquons sur un lien, visitons une page, téléchargeons une vidéo ; ce sont les règles du commerce et de la publicité.

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Au final que reste-t-il de ces quelques réflexions ? Pour le moment je me vois conforté dans certaines de mes convictions, et en revient à d'autres plus anciennes qui m'ont aidé fut un temps, mais tout ceci est essentiellement de la redite, et je sais qu'il faudra aller plus loin que les bases pour m'en sortir. Ces quelques paragraphes, j'aurais pu ( j'aurais dû ? ) les écrire il y a longtemps déjà, mais peut-être n'étais-je pas prêt à mettre les choses à plat ? Pour le moment j'ai, essentiellement, une certitude : depuis que j'ai entamé ce sevrage et plus précisément depuis le passage du troisième mois, je vais mieux, je suis capable d'aller mieux. Des crises il y en a encore c'est certain, mais elles sont moins nombreuses, et je parviens à les surmonter plus efficacement, plus rapidement, et, surtout, sans passer par le porno. Peut-être faudrait-il que je discute de tout ça avec ma psy dès fois que ça apporterait quelque chose au "travail" ?

Allez une petite piqure de rappel :

"On asservit les peuples plus facilement avec la pornographie que par des miradors" A.Soljenitsyne

Je lis tes "pavés", mon bon Morbach...Je trouve que ce que tu rapportes que dit ta psy va dans le sens de ce que je pense, perso... Que ce n'est pas le sevrage qui est une fin en soi mais qu'il permet juste de désépaissir la couche opaque qui recouvre le reste. Gratter par le dessus ne désinfecte pas, alors que forer à travers jusqu'à la couche de "beau" peut assainir de l'intérieur... Je me demande cependant à qui elle fait allusion en parlent de "ceux qui s'en sortent sans passer par la case sevrage"... Dans l'article payant don j'ai mis le lien en nouvelle, il y a un encart avec une petite itv du Dr Codina de l'hôpital Marmottant à Paris qui comporte une cellule sur l'addiction, et à la question "et alors, ils s'en sortent?" elle dit en gros: "bof, faut voir, la cellule est ouverte depuis seulement 4 ans, y en a peu qui viennent, de plus en plus depuis deux ans... Là, y en a un qui semble abstinent depuis 6 mois..." Pas une raison pour renoncer, moi je m'en sors, je ne suis pas le seul, d'autres l'ont fait même si on n'est pas nombreux, et pourtant comme dit Sven, c'est à la portée de tous...Certes, il ne faut pas se limiter à "être abstinent" et espérer que le monde va changer de sens tout seul, mais évidemment en profiter pour se revautrer avec l'excuse que "ça ne sert à) rien" ne fera pas avancer le schmilblick, et la lucidité nécessaire est plus efficace si on ne l'injecte pas de pornendorphines...Ce n'est peut-être pas tant une remise en cause de tes fonctionnements au sens regarder derrière pour voir ce qui a été mal bidouillé, que t'occuper de ce qu'il faut redresser aujourd'hui et devant toi... (Sans allusion déplacée, hein!). Certes voir ce qui a mené à ce que quelque chose cloche est utile, mais il faut aussi s'astreindre à vivre clean aujourd'hui. Et puis demain aussi, mais demain sera aujourd'hui en son temps.Pour moi, l'addiction, n'est pas à un produit, mais à un comportement, même si ce comportement induit des produits neuro-chimiques qui entraînent une modification des habitudes du cerveau qu'il va lui falloir réapprendre à abandonner. Ce comportement est induit par divers facteurs qui poussent à fuir soit des questions qu'on se pose au fond de soi, soit des réponses qu'on n'a pas envie d'entendre (soit un peu des deux). D'où la cohorte de mensonges à soi-même etc.Les différences majeures entre les types d'addiction, je partage ta perplexité, je crois qu'elles sont réduites, si ce n'est que certains aspects plus ou moins anecdotiques (le premier contact avec le produit, par exemple, et la recherche de reproduire cette expérience initiatique... Encore que?). Il y a bien similitude je pense, et j'ai l'impression que cela rejoint bien ce que tu écris, dans la recherche d'une "réponse existentielle"... De même que le junkie cherche le shoot ultime, celui qui lui permettra d'aller au bout de l'expérience et de refermer la page, tout en sachant déjà (tout aussi inconsciemment) que cela n'arrivera pas et qu'après le prochain il faudra encore réessayer, le MBeur est déjà dans l'attente que sa prochaine MB soit finie pour reprendre l'attente de recommencer la suivante... Alternance de faire et non-faire. Personnellement, j'ajoutais à cela les joints... Un joint pour "partir", puis une envie de MB. Après, un joint pour quitter l'après MB... Et une autre MB! etc. J'en arrivais à me dire "Me MB? D'accord, mais d'abord, un joint!" et "Vite, je me MB comme ça ensuite je me roule un joint"... C'est équivalent de "Vite, un joint, avant de me rouler un joint"! Ou bien, "Une MB avant la prochaine MB"...Je crois, moi aussi, que l'accoutumance et la tolérance qui font monter les doses et donnent un besoin de renouvellement du support sont comparables aux autres consommations de drogues. Et je crois que cela fait en effet partie des critères médicaux de définition des addictions.Et le glissement vers le "centre de la vie squatté par la chose" en plus rend indiscutable le problème n'est-ce pas...Je ne crois pas à la thèse du "suicide à petit feu", parce que je ne crois pas au "je veux me faire du mal", je pense qu'il s'agit d'une mauvaise interprétation. L'esprit n'est pas programmé pour s'auto-punir, il est programmé pour vivre et survivre, au contraire. Alors à moins d'une autre maladie mentale qui pousse à cela, ce n'est pas de la dépendance... Je crois plus aux mauvaises interprétations déformées par un filtre mis en place par soi-même et par les préjugés induits par l'expérience et le conditionnement de la vie en milieu humain, des messages de son esprit, qu'on interprète au travers d'une conscience formatée entre autres par le langage.. Ce qui est expressible "tombe sous le sens", et ce qui ne l'est pas par des mots prémâchés est soit occulté soit sujet à erreur...Commode, la honte, sur un plan marketing. La honte accroche le client. Il est socialement reconnu que l'on se MB en secret et qu'on ne médiatise pas cela, même s'il est de bon ton d'être "sainement libéré" sur le plan des mœurs n'est-ce pas... Pas de mal à se faire du bien, même si on n'est pas obligé de le faire devant tout le monde... Pas de honte à se cacher pour faire quelque chose de finalement autant honteux puisque intime et caché, c'est comme faire pipi, on est éduqué à un "respect d'autrui" et on évite de le faire au milieu de la foule... Les conventions sociales font qu'on va plutôt "se laver les mains" que "pisser un coup" ou encore pire "se taper une branlette". Résultat, on est livré à soi-même pour ce qui est de réguler, d'évaluer, de quantifier la moralité, la honte ou autres que cela génère... Du coup on garde ça d'autant plus secret, et on  se cantonne dans l'obscurantisme qui entoure tout le magma du X... "Tout le monde le fait, y a pas de honte à avoir à faire quelque chose dont on a honte tout seul dans ses chiottes", en quelque sorte.Je trouve que tu es lucide, que tu sembles sur le bon chemin, de mon point de vue perso. Je ne vois rien qui parte de travers dans tes raisonnements et questionnements. Certes, cela prend du temps de changer tous ces trucs qui ont été minutieusement installés en toi; ces bugs... Scanner son ordi avec un antivirus prend plus de temps que de le démarrer, et réparer une fois qu'on a trouvé des virus peut prendre encore bien plus de temps. Ensuite, il faut tout réinstaller correctement, et verrouiller encore par un antivirus reconfiguré... Reformatter et réinstaller de zéro n'est pas très court, et cette option n'existe pas pour un être vivant.J'avoue que je ne vois pas clairement ce qui te fait douter ou vaciller ou ne plus savoir où tu en es...?
Citation : Mondom a écrit: Je ne crois pas à la thèse du "suicide à petit feu", parce que je ne crois pas au "je veux me faire du mal", je pense qu'il s'agit d'une mauvaise interprétation.
Oui, tout à fait d'accord, mais quelque part c'est un "suicide sans intention de le donner" ; on se bousille sur tous les plans et en cadence, sans se poser de questions, et un jour arrive ce qui doit arriver. Parler de suicide à petit feu c'est juste une façon pour moi de signifier qu'il n'y a que deux options devant l'addiction ; poursuivre sa descente aux enfers et, tôt ou tard, y laisser la peau, ou alors tenter de remonter la pente ( avec ou sans succès ), et se donner une chance de survivre à ça.
Citation : Mondom a écrit: J'avoue que je ne vois pas clairement ce qui te fait douter ou vaciller ou ne plus savoir où tu en es...?
J'avouerais que moi non plus je ne vois plus trop où est le problème maintenant :)En fait j'ai pas mal ruminé hier après la consultation : dans la façon dont elle m'avait posé ces quelques questions il y avait ( en tout cas je ressentais ) comme une sorte de remise en question globale de tout ce "trip" sur l'addiction à la pornographie, un peu comme on questionne un gosse sur l'utilité de jouer aux playmobil ; un peu comme s'il n'y avait rien d'autre que des idées en l'air dans tout ce que j'avais entrepris depuis fin juillet dernier. Franchement cela m'a donné l'impression de m'être bourré le mou pour rien, et je me sentais comme happé par le spectre qui dit : "tu t'es trompé, encore une fois, sur ton compte, tu t'es inventé des histoires pour te trouver encore des problèmes à résoudre, mais il n'y a rien, tu te plantes, aller voir du porno c'est normal, y'a pas de mal à se faire du bien ...". En général quand je l'entends penser à ma place je flippe, d'où l'idée de tout remettre à plat, pour m'assurer que je ne disjoncte pas, et ainsi le faire taire une fois encore. Du coup j'ai passé ma matinée à rédiger sur divers brouillons ces pavés un peu gnangnans et prétentieux à la fois. Pavés que j'ai finalement recopiés sur mon pc pour avoir une copie plus lisible et que je pourrai conserver sans trop de craintes, et je me suis dit que pour m'en souvenir ( j'ai tendance à facilement oublier ce que j'écris ) il valait mieux le poster ici ; ça me donnera de plus l'occasion de le relire si besoin sans avoir à aller le chercher dans les arcanes de mon disque dur pour le décrypter... Quelque part il y a peut-être là un peu de restes du bambin excentrique qui, après avoir pondu sur son pot son tout nouveau paquet vermoulu, appelle ses parents pour qu'ils voient avec quelle technique il a moulé et déposé le superbe excrément. Sait-on jamais, ce genre d'excrément pourrait servir à quelqu'un d'autre, non ? Wink

   

Je n'y connais rien...Mais, peut-être que c'est très bien?Cette addiction est une construction mentale qui sert des desseins complexes et ramifiés. Je ne sais pas si c'est une vérité, mais c'est sûrement intéressant d'examiner la notion de "construction mentale du besoin de rétablissement"? "Et si tout cela n'avait pas existé"? C'est en partie vrai puisque c'est toi qui l'as construit... Et si tu étais en bonne voie d'être rétabli? Certes, cela ne veut pas dire que cela ait complètement disparu, de l'histoire ancienne, emballez c'est pesé, mais qu'est-ce que ça donne si tu remets en question aujourd'hui ces "choix" mentaux...? J'ai moi-même parfois du mal à me replonger dans ce qui a été mon passé... Du mal à croire que c'était moi, que j'ai vraiment fait ces conneries... Et surtout, pas besoin d'y retourner pour vérifier. Ok, j'ai des casseroles au cul. Mais je vais de l'avant et je n'ai pas besoin de me retourner pour les écouter battre contre le pavé, à la distance des fils qui les rattachent... Et qui s'allongent sans cese.Alors peut-être oui, ce ne sont que des "idées en l'air", tout ça. Certes tu en as payé le prix fort, certes tes troubles de sommeil etc en attestent encore. Mais la liberté existe et est à ta portée.. Lâcher prise, c'est aussi voir que ce n'est plus?Si elle te pousse à aller voir du porno, là il y a des raisons en revanche de monter sur tes grands chevaux et l'envoyer chier, je suppose que c'est ce que je ferais (j'aurais fait) avec la mienne...Penser à ta place? C'est bizarre...Tes pavés ne sont ni gnan-gnan ni prétentieux. Ressasser, répéter, ne fait qu'une chose: cela reprécise, cela permet à ceux qui ont laissé échapper une quelconque subtilité d'avoir une chance de l'intégrer, y compris toi-même. Ne les rabaisse pas, ces pavés, ils sont plutôt limpides et exemplaires, et beaucoup n'arrivent pas à analyser les choses de cette façon lucide.Ce ne sont pas des excréments ni des babillages. C'est de l'essentiel.
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