Dépendance sexuelle

Version complète : CARNET DE JAN GAY DEPENDANT DEPUIS PLUS 25 ANS
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Tu vas me manquer. 
Respire un grand coup, laisse tomber toutes cette pression, cette colere. 
Continue a penser à nous par rapport a ton rétablissement, ne lache pas !
Pense à toi, juste à toi, soit un peu égoïste, réconcilie toi avec toi-même.

Fabrice 
Chers amis !
 
J’ai aujourd’hui vécu « ma première petite révolution personnelle ». Est-ce qu’elle aura un effet durable ? Je ne le sais pas. Je reste très méfiant envers moi-même….
 
Pour faire comprendre ce que je veux dire je pose deux choses:
1)     Ma difficulté de me concentrer et de me plonger dans la lecture p.ex.
2)     Le fait que j’ai donc supprimé mes anciens contacts, ce pourquoi je devais « débloquer » ces contacts, et que ces « mecs » ont donc, eux, le moyen de me contacter.
 
J’ai alors reçu le message de cet ex qui voulait m’inviter pour « un plan » chez lui. Je vous en avais parlé… De plus, un autre de mes anciens « plans » m’a contacté pour me demander si j’étais disponible. J’ai été très excité à l’idée de rejoindre le premier, le contact du second m’a fait plaisir, après plus de 4 mois. De plus, mon copain m’a laissé seul quelques heures cet après-midi… La voie était grand ouverte...
 
Je m’étais pourtant fixé l’objectif de commencer et d’approfondir la lecture d’un livre qui m’intéresse personnellement et qui me serait utile pour m’attaquer demain à un dossier que je souhaite (que je dois !) écrire.
 
J’ai refusé autant l’une comme l’autre « des invitations » et j’ai persévéré dans ma lecture ! Même si parfois mes pensées sont allées vers « ces opportunités », je suis revenu à ma lecture, prouesse énorme en vue des difficultés de concentration qui sont en plus habituellement les miennes.
 
J’ai pensé à mon ami, j’ai pensé aussi juste au moment présent et j’ai pensé aussi à vous en lisant, ce sont ces pensées qui m’ont en quelque sorte « sauvé ».
 
Je me suis surpris ! Malgré moi ! Je n’y aurais même pas pensé. Surtout après ces journées très mouvementées ici sur le forum… Je voulais poser une distance avec le forum, mais la vie m’y ramène, inéluctablement. J’ai trop de choses à prendre ici et à partager, vous êtes devenus trop importants pour moi… ***
 
Je ne suis pas sorti de ma dépendance, loin de là, mais je suis heureux de voir que de bonnes surprises existent aussi pour moi, malgré moi, et par moi-même !
 
Jan

*** Je souhaite vivement que ce soit pareil pour Fr-Ed, même si nous devons limiter, voire cesser de nous écrire.
Bravo Jan!
Tu peux être fier de toi ce soir. Tu peux dominer tes pulsions. La bonne surprise n'est pas malgre toi, elle est de ton fait, c'est grace à toi... Savoure cette victoire et passe une bonne soirée en couple !
Crois en toi et tu y arriveras !
Citation :J’ai refusé autant l’une comme l’autre « des invitations » et j’ai persévéré dans ma lecture ! Même si parfois mes pensées sont allées vers « ces opportunités », je suis revenu à ma lecture, prouesse énorme en vue des difficultés de concentration qui sont en plus habituellement les miennes.

Great ! Continue comme ça !
J'avais lu un article une fois et une phrase m'avait marquée : "Pour sortir de la dépendance, cela passe par l'abandon du déni et l'acceptation de la frustration". Si l'on y parvient, c'est un pas énorme de franchis !
Chers amis !
 
Il est temps de faire un petit bilan. De mon côté, rien de très glorieux n’est à dire. Je n’arrive pas à raccrocher avec la logique du sevrage et je me laisse en quelque sorte vivre depuis quelques temps. Mon amant régulier m’a contacté et nous nous sommes vus il y a quelques jours, j’ai aussi cédé à la relance d’un de mes anciens contacts pour un autre rapport. J’avais supprimé mes contacts, en les bloquant seulement je pouvais moi-même être tenté de les contacter, puisque leurs numéros restaient dans la liste des correspondants bloqués. Mais en les supprimant c’est donc eux qui avaient le moyen de me contacter, ce qui s’est passé et suite à quoi j’ai cédé.
 
Une sorte « d’élan fort » m’a quitté, pourtant je sais par où mon chemin doit passer... Mes questions posées à Fabrice et Fr-Ed visaient à voir si un évènement qui touche notre intégrité physique peut finalement renforcer notre détermination et notre volonté pour vraiment sortir de la dépendance… Je voulais savoir si on doit approcher du « tant va la cruche à l’eau qu’elle se casse »…, s’il faut vivre un évènement « qui nous pose inéluctablement face au mur »… Je crois que c’est un peu le cas et donc je dois me méfier d’autant plus de cet éternel « jeu avec le feu » qui provoquerait l’inéluctable…
 
Je reviens aussi sur un autre élément me concernant et dont j’ai parlé en message privé, je vais en utiliser ici quelques passages… Je comprends qu’on peut avoir l’impression que je justifie constamment mes rechutes et mes difficultés. Et si c’est vrai, il faudrait ainsi que je me demande à nouveau « pourquoi je fais ça ? »… Mais je voudrais expliquer que je ne cherche à priori qu’à « décrire et à expliquer » comment psychologiquement les choses se présentent chez moi… C’est un peu pour présenter les contradictions et questionnements dans lesquels je vis, et ceci dans l’unique but d’avancer : Creuser et creuser encore par un maximum de lucidité et d’honnêteté ! Poser une nouvelle question derrière une question jusqu’à ce que je sois arrivé au bout… Ma vie, ma dépendance, sont telles que je les décris. Et je n’ai aucun intérêt à les justifier, je ne cherche pas à mettre des éléments de côté, du moins je ne crois pas - et j’espère ne pas me mentir à moi-même… ! -, car je souffre de ma dépendance et je veux en sortir !
 
Il faut alors se regarder soi-même et de ce côté-là il y a un obstacle chez moi… Récemment dans une méditation quand il s’agissait de se poser face à soi-même et de se regarder avec bienveillance c’était un moment très dur,… j’ai failli faire une crise de larmes… Je sais que je dois me réconcilier avec moi-même, apprendre à m’aimer, mais je ne sais pas à quel moment ancrer ce redémarrage… Est-ce que c’est depuis toujours que je ne m’aime pas? Même en mon enfance il y a des moments où je ne m’aime pas, et ce sont particulièrement des moments où je me trouve « nul » dont je me souviens le plus … Et quand j’arrive à trouver des moments où « je me touche moi-même », je ne peux pas tenir, car c’est trop douloureux… Donc quelque part « je m’échappe à moi-même », j’ai cette sensation d’être un savon mouillé qui me glisse entre les doigts… Des images m’échappent… elles s’enfuient… ou alors je les repousse… je ne sais pas très clairement dans quel sens ça se joue…
 
Au début de ma présence ici les choses allaient à priori plus facilement. J'ai été très motivé, puis le rapprochement avec un membre du forum a encore renforcé cette motivation, j’ai appris que le maintien du sevrage pouvait passer par une attitude plus autoritaire envers moi-même, par l’application d’une détermination et d’une discipline, par la volonté tout simplement. Mais cette « stratégie » demande beaucoup de force, j’ai perdu cette force… avec les craquages… peut-être aussi par l’éloignement avec le membre en question… Il me fallait un but, moi-même, je ne pouvais pas être assez… le but en quelque sorte était ce membre du forum… Dans la logique du sevrage c’était une erreur, car, par cette « perte dans l’autre » je me suis encore empêché de me regarder moi-même…
 
Je n’ai donc plus de force en ce moment. S’ajoute actuellement la latence dépressive qui augmente chez moi, la montée des angoisses, et je me demande aussi, si ce n’est pas encore un effet pervers du « monstre-dépendance » que d’agir maintenant sur mon énergie et de me pousser dans cet état de faiblesse…
 
Je donne donc ici une description de ce qui m’arrive, je ne cherche pas à justifier, je cherche juste à montrer ce qui se passe ! Je comprends que cela apparaisse comme des justifications. Mon constat du moment : Tant que je ne trouve pas cette force qui m’aide à reconstruire ma détermination et ma volonté, relancer un sevrage n’a pas de sens. J’ai par ailleurs constaté que la pression du sevrage a renforcé chez moi la sensation de mal-être... Depuis que je suis sorti du sevrage j’ai du moins plus d’angoisses… mais loin de moi que d’affirmer que c’est le sevrage qui m’a poussé dans les angoisses ! Je vais retourner vers un sevrage, c’est sûr, mais je ne sais pas quand, … je ne veux pas en rester là où j’en suis… Pour les jours à venir je vais pourtant essayer de me poser chaque soir un objectif pour le lendemain qui vise à vivre la prochaine journée en me rapprochant chaque jour un peu plus de « l’idéal que je vise » : méditation, sport, meilleur rapport aux autres, mais aussi implications plus grande dans mes projets professionnels,.. et surtout : éviter des rapports sexuels gratuits et à risque !
 
Grâce à Fabrice j’ai aussi interrogé ma relation à mon copain, mais c’est un sujet extrêmement intime et je ne veux donc pas l’exposer ici. Je répondrai volontiers à vos questions en message privé, si vous souhaitez en savoir plus. Une chose reste constante : Pour rien au monde je voudrais vivre avec un autre homme ! Je lui ai donné beaucoup d’éléments pour le rapprocher du fait de ma dépendance, mais il ne me questionne pas plus, je pense par simple respect de ma pudeur et de ma honte, par contre il m’offre de plus en plus de signes de tendresse, peut-être pour me montrer qu’il est avec moi…
 
Actuellement, il est parfaitement vrai que je raisonne tout encore en termes de sexualité. Et pour clore je vais donc vous exposer un fait douloureux que je suis amené à regarder de plus près, alors que je m’y suis refusé jusqu’à présent, ou plutôt que je n’y voyais pas un problème. Je préviens qu’ici aussi je n’irai pas plus dans les détails, je vous répondrai à vos éventuelles questions en message privé : Il y a eu un phénomène d’inceste dans mon adolescence… je n’y voyais que la découverte bête et innocente de la sexualité par un partage qui s’apparentait à un jeu ou un secret en commun,… visiblement ces actes ne sont pas si innocents que ça…
 
Le forum est un accélérateur de particules, des particules qui nous font et qui font notre vie ! Il faut apprendre à gérer tout ce qu’on (re-)découvre en peu de temps.
 
Jan
Salut Jan,

le temps est à la fois notre ami et notre ennemi. Je voulais juste t'apporter mon soutien. Je te sens plus apaisé dans ce message, moins angoissé. Tu avances beaucoup sur toi même, il est difficile de mener plusieurs objectifs de front. 
Il est important que tu sois clair sur tes objectifs. A la lecture de ton message, ce que j'en déduis:
(1) ton principal objectif est un travail sur toi-même, accepter la personne que tu es, l'enfant que tu fus.
(2) pendant quelques temps, tu mets le sevrage entre parenthèse, mais tu essaies tout de même de ne pas tomber dans une spirale (quelques relations avec des réguliers mais pas plus).
Ai-je bien compris ? C'est une voie dans laquelle je vois un risque. C'est celui de finalement continuer comme avant, avec un jour un stress plus important qui te fera basculer vers plus de pulsions et toujours plus de sexe (pratiques extrêmes, drogues). Tu connais toi même les risques. Même hors du sevrage, je te conseille de mettre des limites (en terme d'acte, de répétitions des actes). C'est important. Tu peux faire évoluer ces limites (en tendant vers un sevrage total) au cours du temps. Un jour quand ton angoisse sera moins forte, tu pourras surement envisager un sevrage totale, une vie hors du sexe. 
Je laisse d'autres répondre et dire ce qu'ils en pensent. 

Concernant ta justification de tes actes / ta volonté de comprendre, je crois que finalement il ne faut pas chercher à comprendre. C'est difficile pour moi aussi (je suis très cartésien). Je veux toujours tout comprendre, les causes, les conséquences... Cela fait toujours sourire mon psy. En fait, aujourd'hui, j'accepte les choses telles qu'elle sont, ma dualité, ma complexité. Si tu médites un peu, voici un texte qui pourra t'amener à réfléchir sur tout cela. Chaque fois que je l'écoute, je ressens en moi des émotions différentes. 
Appel moi par mes vrais noms (MP3, 10,1 Mo) Poème de Thich Nach Hahn
Je voulais aussi te remercier pour tes questions, tes réponses à mes questions qui chaque fois me permette d'avancer. 

Je suis confiant pour toi, tu y arriveras, tu trouveras ta voie et sans comprendre mais simplement en acceptant de te regarder en face, tu verras en toi ta beauté et tes douleurs. Il faut peut-être accepter la douleur, la dépendance pour voir l'autre Jan, celui que j'ai envie d'appeler d'un autre prénom.

au plaisir de te lire,

Fabrice
Oui Fabrice ! Je veux travailler sur moi-même, déjà pour voir comment je maîtrise mes pulsions pour rester dans un « cadre » que j’arrive à contrôler plus ou moins. Donc je mets le sevrage de côté effectivement. Je sais (et je sens même!) que ce n’est pas la bonne voie pour vraiment décrocher. Ce n’est donc pas une finalité que de procéder ainsi, j’en perçois bien-sûr les dangers que tu mentionnes ! Le sevrage me manque même parfois, la sérénité et la sensation de liberté qui vont avec, cette sensation de démarrer une toute nouvelle vie… Je veux y revenir, mais je ne sais pas encore quand... Ne pas me mettre dans le sevrage ne veux pas non plus dire être plus permissif, mais juste m'enlever une pression que je n'arrive pas à supporter actuellement. Pour le moment je manque de motivation et d'énergie.
 
Je fais de plus en plus de méditations, et ça, ça m’aide vraiment, car ça m’ouvre une voie pour approcher mon corps et mon esprit dans leur intégralité d’une toute autre façon, de considérer mon corps et de le respecter, de l’écouter, et non de « l’utiliser » comme dans le sex. Par contre, je vais plutôt prendre les méditations sur le site que tu m’as indiqué dans l’ordre, je ne suis pas (encore) rentré dans la méditation avec le poème…
 
Hier soir j’ai même proposé une première courte méditation en commun à mon copain. Il est assez sensible à ce genre de démarches, au début de notre relation je lui avais appris la relaxation corporelle qui fonctionne un peu comme le « scan corporel » de la méditation. Il a plutôt observé comment se passe cette méditation. Ce moment en commun nous a amené à discuter plus longuement et nous avons aussi parlé de la sexualité… je lui ai à nouveau dit que le travail que je fais en ce moment a un lien avec la sexualité… qu’il me faut avancer ici pour retrouver notre sexualité en commun… et je lui ai parlé de l’inceste adolescent… il a été très surpris, mais pas choqué. Cela a bien entendu complété le regard qu’il porte sur moi et sur les difficultés que j’essaie de régler.
 
Je pose des choses doucement, les unes après les autres. J’espère – non, je pense, j’observe même ! - que ça me mène petit à petit face à des évidences pour voir que je n’ai finalement pas le choix, et de plus que je n’ai pas à avoir peur, de rentrer à nouveau dans la logique du sevrage pour décrocher. Les choses mises en place petit à petit m’amènent déjà à constater avec un peu plus de force que ma vie n’est pas si mal que ça et que des exigences, comme de m’occuper de moi-même par la méditation et le sport, ou encore comme faire des choses pour mon copain et passer des moments en commun, s’imposent d’elles-mêmes.
 
Jan
Wouahhhh...... 
Pas à pas, et parfois des bons. Continue Jan, je suis heureux pour toi en lisant ce post.
Prendre soin de soi, s'ouvrir aux autres, simplement vivre. Tout cela s'impose à toi car je crois que tu es en train de lâcher prise, de t'accepter tel que tu es. 
C'est amusant, tout un post où finalement tu ne parles plus de sevrage, et quasiment plus de dépendance... Tu parles de toi, de ton copain. 
Le site pour la méditation est vraiment très bien, et la personne guide simplement sans rien imposer. C'est devenu depuis quelques semaines mon site de méditation (je suis dans le cycle sur la bienveillance).
Tu as la motivation pour faire la méditation, pour parler avec ton copain... Ne soit pas trop dur avec toi ! C'est déjà beaucoup. 
Au plaisir de te lire.
Fabrice
Des éléments sur l’enfant que j’ai été. Discours intérieur. Une porte s’ouvre.
 
J’ai démarré l’après-midi de ce dimanche par deux méditations. Je commence à être de plus en plus avide de faire ces voyages en moi-même, d’installer une communication saine avec mon corps et mon esprit. Mon amant régulier m’a contacté pour que je le rejoigne à son travail… J’ai dit « non », avec respect. Il n’a pas insisté.
« A bientôt ! ».
 
Mon copain et moi voulions regarder un film ensemble, finalement il n’en a plus eu envie… que vais-je alors faire ? Regarder si un de mes autres amants ne m’a pas envoyé de message ?...
Non. Je garde le portable éteint.
Je fais alors un feu dans notre poêle à bois, je travaille un peu par terre, puis je me détends devant le crépitement des flammes :
 
« .. et pourquoi tu n’arrives pas à aimer cet enfant que tu as été ? ».
« Je le trouve « péteux », il n’a eu de cesse de vouloir se faire remarquer, se faire aimer. »
 
Pendant un bon moment et comme avant je ne trouve aucun moyen de m’accrocher à quelque chose que j’aurais aimé en cet enfant,… ni du temps de l’école maternelle, de la primaire, du collège… ; juste un tout petit peu des moments du lycée, l’enfant avait peut-être moins à prouver et bizarrement ça correspond à la période dans laquelle je sais qu’il a été apprécié…
Je m’apprécie donc quand les autres m’apprécient… ?
 
« Mais ce n’est pas possible, il doit-y avoir quelque chose de positif même plus tôt…?! »
« Si je me regarde de l’extérieur, je ne m’aime pas. Mais étant qui j’ai été, à l’instant où je vivais, je ne me détestais pas… »
« Cherche alors, tout n’a pas été mauvais.. ! »
 
« … quand nous allions à l’école primaire, nous prenions le bus. Je montais relativement au début du trajet. Quelques kilomètres plus loin montait une fille, elle allait à une école spécialisée. Les autres avaient décrété qu’elle sentait mauvais. Elle avait alors reçu un surnom en lien avec sa supposée odeur. Elle avait l’air triste, car personne ne voulait qu’elle s’assoit à côté de qui que ce soit dans notre bus. J’ai observé ce triste spectacle quelque temps, puis un jour quand elle montait à nouveau dans notre bus, j’ai alors quitté ma place à côté de mon ami et j’ai proposé à la fille une place à côté de moi, juste pour qu’elle ne soit pas seule. Les yeux baissés, elle m’a souri par en dessous. Et elle ne puait pas, elle avait juste une autre odeur, son odeur à elle. 
 
J’ai fait ça plusieurs fois,… je ne sais plus très bien comment les choses se sont passées après... elle n’a pas voyagé très longtemps avec nous, juste quelques mois, je crois. Mais je la revois… : Un jour elle est assise sur le banc juste à côté du chauffeur, souriante et en train de papoter ; c’était la place que tous les élèves voulaient avoir… quelqu’un a dû lui céder sa place… peut-être mon frère… 
Je devais avoir 7 ou 8 ans…
 
Oui, en fait, j’ai toujours eu une âme sensible, solidaire et sociale, j’ai détesté l’injustice et le refus gratuit, l’absence d’intelligence humaine ! Et c’est vrai, cela m’a accompagné tout au long de ma vie. Je tiens cette « âme généreuse » sur le plan émotionnel de la part de ma mère, et sur le plan intellectuel de mon père.
Je suis fier d’être le fils des parents qui sont les miens ! ».
 
Je suis allongé face aux flammes qui crépitent, mon cœur s’est ouvert, il est ému… une sorte de lumière se fait dans la façon par laquelle je me regarde maintenant… je comprends soudain pourquoi j’ai finalement eu pas mal d’amis quand j’ai été enfant, même si je n’ai pas été le garçon que je rêvais être. Car de « vrai garçon », il n’y en avait qu’un : c’était mon frère.
 
« Durant mon enfance en fait je n’ai pas aimé mon frère. Il était là, tout simplement, je n’avais pas d’autres choix que de faire avec. De jouer avec lui, et ceci toujours d’après le même scénario : Quoique nous jouions, il était le plus fort, ses voitures les plus puissantes et ces peluches ceux qui commandaient ! Il y a une photo très significative avec lui, un ami à lui et moi : Les deux en tenus de cowboy sont en train de mes viser avec leurs fusils en bois ! J’ai l’air con, la tête penchée sur le côté… qui a pris cette photo de merde en plus… ? J’ai été juste bon à jouer la victime pour confirmer ce statut de « mec » qu’avait mon frère, et que moi je chercherai toute ma vie à acquérir. Fr-Ed sait de quoi je parle, nous avons pas mal évoqué ce sujet lors de nos échanges… En tous cas ces jeux à la con aussi ont fini par me faire aimer les plus faibles, notamment les Indiens d’Amérique. De toute façon, c’est indiscutable, dans les « Westerns » ils sont tellement plus beaux, souvent à moitié nus et super sexys,… alors j’emmerde les « cowboys au fusil en bois » !
 
Je n’ai rien contre mon frère. Je l’aime tel qu’il est et tel qu’il a été. A notre adolescence il m’a pris sous son aile et intégré au sein de la bande de ses copains. Nous faisions des sorties et virées ensemble, nous faisions des fêtes ensemble. A partir du moment où je n’étais plus seulement « le petit », étant le seul de la famille à préparer et passer mon « bac », il m’a plutôt respecté, ce qu’il fait encore aujourd’hui, lui étant finalement plus « manuel » que moi (… tu m’étonnes !). Je ne lui en veux de rien du tout ! Sauf étant petit, c’était dur d’être « le petit frère ». Quand ça devenait trop insupportable, je crois bien que c’est moi qui commençais à le battre, de rage et d’impuissance. Sauf qu’il était bien évidemment plus fort que moi… »
 
« Je m’aime pour l’amour que j’ai toujours eu, jusqu’à aujourd’hui, pour ma mère. Car elle était faible aussi, et elle l’est toujours. Quand mon père la dominait intellectuellement – alors que je souligne que mon père n’était pas un homme violent ou pervers, il était tout simplement plus intelligent qu’elle – je prenais la défense de ma mère. J’aimais qu’elle soit tendre avec moi, elle était d’ailleurs la seule personne au monde qui l’était avec moi… ! Je crois qu’elle aimait ça aussi, j’ai peut-être été un peu son refuge affectif… »
 
« Cet « enfant péteux » avait peut-être ses raisons de vouloir attirer l’attention à lui. »
 
« Oui, c’est vrai. Il y avait un gars plus fort au-dessus de lui, son frère. Donc, il fallait bien se faire sa place. Puis, une bombe atterrit dans la famille par la découverte de la maladie grave de la grande sœur. Un nouveau pourcentage d’attention, de soucis surtout, est alors porté sur elle. Bien entendu elle n’y est pour rien, la pauvre. Elle en meurt 8 ans plus tard… à l’âge de 22 ans, j’en avais alors 13. »
 
Mon émotion s’ouvre…

« Je voudrais retourner au moment où tout était encore sans problème ! Où l’harmonie familiale est en place. J’ai adoré ces années ! Le jour, où je mourrai, je voudrais que le court voyage intense qui précède la mort, selon le dire de certains, m’arrête exactement à cette période-là et que j’y reste coincé pour l’éternité !!! Accompagner en plein été mon père et mon frère pour tondre la pelouse autour de la maison, me faire servir depuis le balcon de la maison des boissons fraîches par ma mère et ma sœur, accueillir l’après-midi de ce samedi d’été les oncles et tantes de la famille… il n’y avait malheureusement pas de cousins, ni de cousines… ça, c’est le bonheur pour moi ! …
 
… et était-ce un samedi ? … je vois soudain cette trousse de jouets que ma sœur m’offre un jour : C’était une trousse avec des petits éléments en bois, en partie colorés, et des outils en bois. Une trousse de bricoleur ! Un truc pour un petit mec. Je sens encore la texture de la trousse en plastique transparent très doux, j’entends le bruit qua ça fait quand je manipule la trousse, ce petit crissement, … je sens ces éléments de bois dans mes mains, je sens leur odeur !
Je me vois tellement plus petit que ma sœur… elle jouait toujours en haut sur son lit, superposé au-dessus de celui de mon frère. J’étais trop petit pour y monter, ma nuque me faisais mal à force de regarder vers la haut… »
 
… Et une crise de larmes me submerge là par terre, aujourd’hui, plus de 40 ans plus tard.
Après la discussion d’hier soir avec mon copain je ne crains pas qu’il me voit comme ça…
Il comprendrait.
Mon diaphragme se sert, très fort, mon corps se tord,
et les larmes et la douleur sont expulsés de mon corps,
le coussin sur lequel je suis allongé se mouille…
 
« Ma sœur, pourquoi tu es partie il y a 37 ans déjà ?
Pourquoi tu ne t’es pas plus battue ? »
 
Ma douleur crie son nom encore et encore…
mon corps entier se tord, se courbe sous la douleur et les larmes…
 
J’ai perdu cette sœur il y a plus de 37 ans.
Ces plaies ne cicatrisent jamais.
 
… … … …
 
Je suis heureux d’avoir pu faire ce voyage vers l’enfant que j’ai été, heureux d’avoir tenté de le regarder à nouveau pour l’aimer, un peu, et d’avoir remis à nu mes douleurs premières. Je ne sais pas si cela contribuera à ma guérison de la sex-dépendance…
Mais je sais que je dois vider ces trop-pleins qui sont en moi !
 
Peut-être que dans quelques jours je retire ce message de mon carnet,… trop intime, trop pathétique… mais au moment où je me redresse, je décide de partager ce moment avec vous tous.
 
Et j’écris alors.
 
Jan
salut Jan,

pas trop de temps pour le forum actuellement. Ton message est très émouvant. Merci pour cet échange très intime. 

J'avais été surpris lorsque nous avions parlé de ta jeunesse avec quel détachement tu pouvais parler d'évènements que je trouvais marquant. 

Je suis de plus en plus convaincu que la méditation permet ce regard sur soi, de ne pas fuir l'image du miroir de plonger dedans et progressivement d'aller un peu plus loin. Ce travail d'acceptation, de lâcher prise est progressif. Sois bienveillant avec toi même et soigne toi par l'amour que tu te porteras.

Citation :Je suis heureux d’avoir pu faire ce voyage vers l’enfant que j’ai été, heureux d’avoir tenté de le regarder à nouveau pour l’aimer, un peu, et d’avoir remis à nu mes douleurs premières. 


Je ne redis rien d'autres que ce que tu as écrit. Les liens avec la dépendance ne sont pas évidents, mais n'essaie pas de comprendre, juste de ressentir, et sans trop te poser de question, accepte les bienfaits que cela te fait.

Continue, tu avances !
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