Demain, y'a école : à la demande du CHU, je vais témoigner dans un groupe de parole de dépendants sexuels, il parait que je leur ai fait une forte impression l'an dernier.
C'est le psychiatre spécialisé addiction que j'avais sollicité en 2002, quand j'avais découvert qu'il y a avait quelque chose de Pourri au Royaume du Porno, et surtout de mes Rapports Compulsifs avec Lui, qui me demande cette apparition en guest-star du sevrage réussi.
Pour voir ce que je vais leur raconter, je commence par jeter un oeil aux 1395 messages que j'ai déposés sur le forum du site, rassemblés en un seul fichier word à une époque où Pikmin avait mis cette fonction à disposition.
J'ai dû jeter les notes que j'avais prises l'an dernier, c'est malin.
Et puis, ça me saoule vite.
J'ai du mal à me regazéifier avec mon propre gaz.
Mon parcours, je peux le résumer fastoche :
Une liste variée de subterfuges pour échapper à cette vérité apparemment insoutenable :
de la naissance à la mort, nous sommes indiciblement seul (c'est pourquoi je retranche le s) dans notre pyjama en peau.
Quand j'ai fini par accepter cette solitude comme une donnée de base plutôt que de la craindre comme une malédiction, et de vouloir la fuir à coups de compulsions paniques, l'équation a été plus facile à résoudre.
Evidemment que la dépendance de base, elle est affective et sexuelle :
Tout plutôt que la solitude, tout plutôt que la liberté et la responsabilité de donner un sens à sa vie.
Une fois ce gros morceau bien indigeste avalé, reste la question des outils.
La réponse que je me suis donnée, c'est de les essayer tous, jusqu'à trouver ceux qui me convenaient.
Un psychiatre, le sevrage, la rencontre d'Orroz, le costume de chevalier blanc sur les forums, une thérapeute, du bouddhisme, des blogs, le travail, le jogging, le rebirth, les rencontres avec des dépendants, les comics en VO… je mesure bien la chance que j'ai, et je comprends bien que je reste fragile et puis redevenir la proie du tigre de l'addiction, prêt à me sauter dessus si je bouge, disons si je lève le coude ou si je commence à dégrafer mon ceinturon devant mon ordinateur, comme un vrai cow-boy fraichement arrivé en ville et qui se dit qu'il va se taper une cyberpute au saloon parce que ça fait 3 mois qu'il est dans le désert depuis trop longtemps, et que les vaches ça va bien un moment mais qu'elles ont une conversation somme toute limitée...
Un jour à la fois.
Le plus dur à trouver, c'est l'équilibre entre prudence et névrose. Je retrouve une note où une amie me rappelle que "L'addiction est plus ou moins le sort de chacun, bien que certains comportements compulsifs reçoivent des compliments, ce qui les fait passer pour autre chose. Il y a en effet des addictions à son travail, ou à la propreté dans la maison, p.ex. qu'on peut facilement observer autour de soi.
Un autre point qui m'est venu à l'esprit, c'est que le simple fait de vouloir en finir avec l'addiction provoque une tension qu'il va forcément falloir relâcher, et comme la manière habituelle de décompresser est justement l'addiction, il est parfaitement normal que ça reprenne de plus belle.
C'est pourquoi je pense que le conseil de *** proposant de remplacer l'addiction par une autre moins gênante est un excellent conseil. Reste à le mettre en pratique, et là l'obstacle peut paraître insurmontable, vu qu'on n'a pas l'impression que le nouveau jouet vaille l'ancien, impression qui se confirme aux premiers essais.
Bref, en pratique, après avoir soigneusement noté tous les détails possibles sur le sujet, (&hellip l'obstacle ici est fait de prendre les choses au sérieux. En effet ce comportement compulsif qu'on a bâti à partir de rien, a l'air d'une montagne, et c'est là que les observations glanées aux trois niveaux peuvent nous venir en aide, pour décider de ce qu'il en est réellement.
Comme dit Castaneda, les gens ne savent pas à quel point il est facile de laisser tomber une habitude; et s'ils ne le savent pas, ils savent autre chose au sujet de ce qui nous occupe, à savoir p.ex. que c'est difficile, long, qu'il y a des échecs fréquents, bref toutes sortes de choses très sérieuses.
Ce sérieux, c'est le fait de prendre nos idées pour une réalité de solide et immuable. Elles sont solides, en effet, ces pensées, pour peu qu'on leur prête vie, et immuables, si on les entretient, mais on peut parfaitement jouer à en inventer d'autres, qui seront non moins solides, et je suppose que c'est ce que font les bouddhistes tantriques qui en arrivent à prendre le thé avec leur yidam.
Jouer avec les pensées, ça permet de faire un petit peu bouger les noeuds qui nous lient à cette réalité bien précise qui est la nôtre, car nos prisons commencent avec une pensée.
Après cette prise en mains des pensées, il convient de choisir une autre "addiction pour jouer", et là il suffit de choisir parmi nos penchants naturels, quelque chose de non gênant. Si on a l'impression que ça ne marche pas, il faut se rappeler que c'est un jeu; on fait semblant en attendant de voir qu'on a fait semblant beaucoup auparavant, pour en arriver à créer cette réalité qui nous embête. "