Dépendance sexuelle

Version complète : Un peu de moi.
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Hi,

 Il est difficile pour l'ultra-pudique que je suis de venir m'épancher ici, mais c'est pourtant l'unique moyen de briser ce cercle-vicieux qui est en place depuis maintenant plusieurs années.

Vous ne saurez qui je suis, ni mon âge, ni mon nom. D'ailleurs, cette partie de moi accro aux sites ne mérite en aucun cas d'être quelqu'un : elle est méprisable.

J'ai commencé à regarder les hommes dès l'âge de 10 ans. Seulement, au lieu de regarder mes camarades de classe, c'était plutôt mes professeurs de l'époque ou les papas des sorties d'école qui suscitaient toute mon attention, mon admiration. Je les trouvais rassurants. Terrorisé à l'idée de dévoiler cette attirance, je jugeai préférable de la garder pour moi. Les années ont passé, et cette quête sans fin d'un père inexistant a continué d'opérer de plus belle, rendant ces hommes beaucoup plus âgés que moi attirants, sexy, sans faille, déroutants. Inaccessibles. Je les admire, les désire, parfois les interpelle. Les fantasmes que l'on peut avoir à l'âge de 14 ans se sont mis en place. Jusque là, rien de très "crade" ou avilissant, je rêvais plutôt du prince charmant, même si je ne me sentais à ce moment précis loin de mon innocence.

J'avais 16 ans lorsque Internet est arrivé à la maison. Chamboulement, renversement, confusion et enfin, révolution. Je me rappelle que la première chose que j'ai faite lorsque je me suis retrouvé devant cet ordinateur est d'avoir lancé le moteur de recherche afin de poser une image sur ces fantasmes. Et bien sûr, je l'ai trouvée, d'une facilité qui a débecté une partie de moi, comblé une autre. Cet autre, c'est celui qui a pris le dessus devant l'écran, celui qui est toujours là et m'envahit de plus en plus. C'est l'homme à abattre. Je me disais qu'objectivement, je n'étais qu'un simple ado qui se cherchait depuis un moment et qui, comme la plupart de ses camarades de classe, s'astiquait devant des sites porno. Hétéro / bi / homo ne rentraient ici pas en ligne de compte, du moins c'est ce que je pensais. Le fait d'être homo était mon secret, ma vie privée, et il en allait de même pour mes activités virtuelles compulsives.

Néanmoins, je croyais toujours au prince charmant, à quelqu'un de désirable et que l'on peut aimer dans la vraie vie. A 19 ans je me suis inscrit pour la première fois sur un site de rencontres. Et c'est à ce moment là que la spirale infernale s'est mise en place. J'y ai rencontré mon premier partenaire, puis le deuxième, et ainsi de suite. Mais ça ne valait pas les innombrables plaisirs solitaires, dont le plaisir procuré par ces sites où tout devient possible était sans limite. J'ai eu au départ ce sentiment "d'évolution" de mon plaisir égoïste qui allait croissant, et le fait de pouvoir ressentir chaque échelon de cette gradation de jouissance valait au moins autant qu'un rapport sexuel consenti dans le cadre d'une relation affective ou amoureuse. Bien sûr, au commencement le rythme était inconstant, cyclique. Il m'arrivait de ne pas retourner sur cet Eden du sexe pendant plusieurs semaines, parfois plusieurs mois. Et puis, le temps s'est fait de plus en plus long, l'attente est devenue source d'angoisse, d'irritabilité, jusqu'à devenir une obsession. Quand allait se terminer ces vacances interminables ? Après deux mois sans internet, je méritais bien en fin de compte de retrouver mes fichiers vidéos favoris. Lequel allais-je commencer à visionner dès mon retour ? 

J'ai ensuite rencontré un homme que j'ai aimé sans fin. Ma dépendance virtuelle est passée à une dépendance réelle, puisque j'étais vraiment accro à lui. Seulement l'histoire était compliquée et vouée à l'échec sur le long terme. C'est pourquoi quand les choses ont commencé à se gâter, le porno était là lui pour me rassurer, me faire oublier, m'approprier. J'étais de nouveau prisonnier, en une session et quelques clics, après environ 6 mois de sevrage. Puis vint la culpabilité, ce sentiment effrayant, mêlé à la colère et l'incompréhension. Etait-ce pour me venger de ce que l'amour réel m'infligeait ? Sans doute. Et puis après tout, tromper n'avait rien à voir, tant que désirs et plaisirs restaient bien au chaud dans ce fort intérieur sans en déborder. A partir du moment où rien n'était réel, la question de la fidélité n'avait même pas à être posée. Pas de culpabilité à avoir, donc. Dans ce cas, pourquoi le malaise était de plus en plus embarrassant après chaque épisode ? 

J'ai ensuite mis un terme à cette relation dont la détérioration allait de mal en pis, puis rencontré quelqu'un d'autre, toujours bien plus âgé que moi. C'est là que j'ai commencé à me poser de très sérieuses questions sur moi-même. Cette relation était au bas mot perverse, destructrice. 

La pornographie basique et sans feeling était devenue ringarde, j'étais totalement accro à lui. Je n'ai compris que bien plus tard que j'étais accro au sexe avec lui. Dominateur émotionnellement, mais soumis sexuellement, il était mon objet au même titre que mes protagonistes cochons virtuels. Mais au bout de quelques temps, il ne me désirait plus physiquement, et a mis en oeuvre tout un tas de stratégies plus ou moins discrètes et délicates pour me repousser. Frustré et face à un glaçon d'azote lorsque j'ai souhaité à maintes reprises éclaircir les choses, obtenir des réponses, comprendre. C'était peine perdue. L'espace entre chaque rapport s'est creusé considérablement, me frustrant terriblement et donnant lieu à des engueulades très mouvementées et incisives. C'était injuste. Mais heureusement, Internet et ses sites étaient toujours là pour me consoler, sans aucune explication à glaner : le porno, véritable fléau, soignait tous mes maux. 

Le tournant de l'histoire se situe lorsque l'idée saugrenue de fouiner dans l'ordinateur de mon conjoint absent m'a envahie. C'est alors que je suis tombé sur des archives de conversations pour le moins immorales et on ne peut plus "hard", auxquelles était couplée une ribambelle de sites "trash et hardcore". En moins d'une minute, je découvris le vrai visage de l'homme avec qui je partageais ma vie depuis plus d'un an. Je me sentis comme une victime. Mais en fin de compte, j'étais l'arroseur arrosé. Il ne se situait qu'à un stade beaucoup plus avancé que moi dans l'avilissant, l'humiliant, le crade et le glauque.

J'aimerais pouvoir vous dire que c'est à partir de ce jour là que j'ai pris conscience de mon problème et que j'ai commencé à vouloir changer, mais ce serait raconter une histoire qui n'est pas la mienne. J'ai au contraire essayé de comprendre, de lui pardonner, de "le tirer de là", loin de ces choses épouvantables. En réalité, ça n'a fait qu'empirer, jusqu'à ce que je tombe moi-même dans l'avilissant, l'humiliant, le crade et le glauque. J'ai donc par la force des choses fini par le quitter, à bout. C'était lui ou moi.

Aujourd'hui je pense être guéri cette relation malsaine et d'interdépendance que j'entretenais avec lui. Ce qui est pour moi déjà une grande victoire, en bon toxicomane de service, je ne pensais pas en arriver à ce stade de liberté aujourd'hui. J'ai un immense poids en moins et peut donc dire que ça en vaut la peine. Mais je ne veux pas prolonger cette dépendance à-travers une addiction au cybersex et à la pornographie qui elle, ne s'est jamais vraiment éteinte.

C'est donc aujourd'hui où je dis STOP, et où cette partie de moi doit mourir définitivement. Je ne savais pas encore que hier serait la dernière fois que je me retrouverais confronté à un site internet à caractère pornographique. Jusqu'à ce que je tombe sur le site d'Orroz, et que je constate qu'il était possible d'en sortir par des moyens pragmatiques. 

J'ai conscience que mon histoire est particulière et qu'elle n'a peut être même pas lieu d'être ici, puisque je ne sais pas si beaucoup de membres pourront se reconnaître à travers ces paragraphes. Je souhaite simplement dire à ceux qui veulent tout comme moi mettre un terme à tout ça qu'ils sont avant tout en colère contre quelqu'un, quelque chose ou contre eux-mêmes, et qu'il est capital de remonter le temps pour localiser la raison qui les a poussé tout droit dans ce gouffre sans fond. C'est là que la vraie guérison débute, la période parallèle de sevrage étant la plus difficile en pratique, car "bête et méchante" et rattachée à des choses plus douloureuses et profondes qui sont propres à chacun. Il est déjà plus que courageux d'avoir fait la démarche d'en parler, même dans l'anonymat, car il est avant tout difficile de reconnaître que quelque chose ne tourne pas rond chez soi et de se donner de réels moyens pour changer. Je suis moi aussi en colère. En colère contre mon ex, en colère contre le manque et l'absence insupportables auxquels j'ai été confronté. En colère contre le père que je n'ai jamais eu et enfin et surtout, en colère contre moi-même, a fortiori dans ces nombreux moments où je me suis perdu dans ce désert immense fait de mirages de désirs, dans cette quête infinie de jouissance poussée à son paroxysme. 

J'espère qu'un jour l'État qui minimise au plus haut point ces sites nuisible sans limite, et beaucoup trop facilement accessibles aux plus jeunes prendra de sérieuses mesures, plutôt que d'aborder le sujet comme un tabou embarrassant. 

Merci à ceux qui m'auront lu jusqu'ici,

Bon courage à tous, n'oubliez pas que votre liberté est à la clef, ce qui n'a pas de prix.

Salut secret.box instrumentum. Ton témoignage n'est pas tant là pour que les gens se reconnaissent dans ton cas ( et de toute façon à quoi bon puisque tous les cas sont différents ) ; si tu témoignes, c'est avant tout parce que cela t'aide toi. On peut retirer beaucoup de choses du témoignage de quelqu'un, mais ce n'est pas la condition sine qua non pour qu'il poste. On sent bien la colère dans ton témoignage, et c'est vrai qu'on passe tous à un moment ou à un autre par des périodes de grande agitation : on s'en veut, on en veut aux autres, on en veut au système de laisser faire ça. Mais il faut que tu comprennes que la clé ne réside pas dans la violence que tu dirigeras contre tes penchants : tu ne tueras pas cette part de toi que tu rejettes aujourd'hui. Il te faudra accepter de lui tendre la main pour la comprendre, et aussi pour qu'elle arrête de te ronger de la sorte. Se battre contre soi-même est un non-sens. Cela ne veut pas dire que tu n'as pas le choix de tes actes ; cela veut dire que ce n'est pas en jouant les Ouroboros que tu sauvera ta peau, bien au contraire ...Mais tu viens à peine de débarquer et je t'embête déjà avec de la théorie : bravo pour avoir eu le cran de témoigner et de t'engager vis-à-vis de toi-même. Ce ne sera pas facile, tu t'en doutes. On est une bonne bande de bras cassés ici, mais certains s'en sortent : il est donc possible de s'en sortir. Mais accroche-toi, parce que tu te mesures à un monstre de taille plus que respectable. Pour le moment il te faut tenir, par tous les moyens possibles et imaginables : première leçon, celle de ton impuissance face au produit.Bon courage.
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